I Got The Magic In Me!

Réfractaire, le cadrant d'une l'horloge digitale indiquant 7:20 et distillant ce halo contre les cloisons du wagon auquel j'appartenais, je passais une main nonchalante au cœur des houppes dissidentes agençant mon madras de mèches hirsutes et me rehaussais sur mon siège, calant paresseusement mes reins au dossier miteux. Cachoté par les soubresauts du train, j'ajustais le veston malmené par mes somnolences et perchais mes binocles sur mon nez, l'une de mes boucles d'oreilles d'argent raisonnant contre le bois du fauteuil, puis laissais flirter mon regard sur les sombres paysages extérieurs, pavoisés de lueurs et humectés de rosée. Doucettement, j'approchais de l'académie dans laquelle j'allais débuter les cours sous l'aspect d'un tout jeune proviseur; enseigner la langue étrangère qu'est le Français à des élèves en majorité Nippons, et cela me taraudait assurément. Allais-je être à la hauteur ? Suivre une classe s'avère être manifestement plus aisé que la façonner soi-même. Quoi qu'il en demeure, et ce malgré mes doutes, j'étais décidé à offrir mon maximum dans l'espoir d'inculquer la passion qu'est la mienne aux écolières de cet établissement pour damoiselles, et l'arrêt de la locomotive ne fit que décupler cette hardiesse insolite. « Me voici finalement arrivé. Courage, Koga ! Comme dirait ce metaleux au sonisphere : "Qu'est-ce qui y'a ?!" ! » Me clamais-je tandis que j'harponnais vigoureusement mes valises, remonté à bloc. Précipitamment, j'achevais un soupir harassé – sans doute qu'assister à un concert la veille de prendre la route n'était pas une idée exemplaire – et remontais jusqu'aux panneaux directionnels, décryptant les informations transcrites sur le morceau de papier froissé que je gardais à disposition depuis mon départ. Je ne connaissais absolument pas la ville que j'arpentais et mon niveau de lecture japonaise décelait encore certaines anicroches. J'avais vécu en France si longtemps que mes origines asiatiques en étaient pratiquement reniées. Téméraire, je hissais ma démarche véloce jusqu'au quartier qu'il me fallait dénicher et tombais finalement sur le bâtiment de la "Girl Academy", les teintes violines des édifices m'arrachant un sourire : cet environnement était bel et bien une école pour jouvencelles, impossible de nier cette évidence. Sillonnant puis outrepassant les herses des constructions, j'abordais hâtivement et d'un air flâneur le hall de la bâtisse des cours et de l'administration, penaud; intrigué. Visiblement, le personnel du domaine était au beau milieu du petit déjeuner, et cette éventualité m'extorquait un énième rictus amène, alors que je prenais docilement place aux abords de l'accueil.

Flegmatique et enclin à l'appréhension, je lynchais un souffle bilieux, essayant de contenir cette anxiété méphistophélique qui lapidait vulgairement ma dédaigne de gandin interdit. Irrésolu, mon index chancelant flattait la paire de bésicles juxtaposées sur mon museau et s'en emparait rondement en un mouvement allègre, la manche de ma chemise bringuebalée par la brise se faufilant au creux de la salle immense, plus chatoyante qu'une toison de sucreries. Glissant ces lunettes au nid de l'uniforme réglementaire; coinçant une branche à l'encolure du vêtement prosaïque, j'apposais une œillade aux alcôves de la pièce, aphone. J'allais sans contrefaçon devoir m'équiper d'un document, si je souhaitais ne pas être en retard aux heures de cours et retrouver le chemin des dortoirs, la quête de savoir qui risquait de partager mon logement me traversant l'esprit.

Séquestré aux serres de songes chronophages, j'ouï cependant le bastringue singulier des chaussures masculines, leur écho se répercutant aux encoignures de l'immeuble, et orientais mes prunelles céladon en amont du damoiseau venant de pénétrer dans la salle gargantuesque. Mirant ce jouvenceau, je disposais mes bagages dans un recoin, au-dessous d'un banc, et frictionnais mes mains basanées à l'étoffe de mon costume corbeau pendant que cet homme me côtoyait. Des cheveux blonds ? Peut-être était-il métis, à mon image.

-Salut je t ai jamais vu auparavant t ai un nouveau professeur? je me présenté je Keiichi Wakaouji et toi?

À l'écoute de mon titre d'enseignant, un frisson me rossait l'échine. 'Nouveau professeur', il est si étrange d'entendre ces paroles pour la première fois. J'avais du mal à réaliser ces responsabilités nouvelles qui m'incombaient. Complaisant, je dédiais à mon interlocuteur un sourire charmant, noyant mon regard fruité en ses pupilles encadrées d'ambre, et prenais le temps de toiser les écolières avec amabilité avant d'accorder au dénommé Keiichi une poignée de mains avenante.

- Vous semblez apprécié parmi les étudiantes. Déclarais-je, agréable, un rire cordial au bout des lèvres. Kurenai Koga. Je suis le nouveau professeur de Français et, accessoirement, de Lettres. Enchanté de faire votre connaissance, Monsieur Wakaouji. Quant à vous, professeur de musique, ou simplement fan ? Vous détenez une très jolie guitare, quoi qu'il en soit.

-Effectivement je bien professeur de musique et je vous remercie pour le compliment sur ma guitare si veux je peux vous montrer le dortoir des professeurs afin que vous puisse poser vos affaire et vous reposer quand au élèves Oui peut dire que je suis appréciais mais vous remarquer que vous les lasserai pas indifférent non plus enfin vous verrai ca par vous même.

Octroyant un rictus sincère et débonnaire à ce confrère obligeant, je relâchais notre étreinte zélée et conformais le nœud-papillon festonnant mon costard d'un revers sommaire, ma nuque ceinte par ce complet dont je n'avais depuis ce jour nul usage. Moi qui prônais à l'accoutumée les hardes satiriques d'architecture Punk-Gothiques, aux tonalités funèbres, le déguisement solennel m'acculant cambrures et biceps martelait mes muscles et m'immolait d'une oppression inhabituelle. J'allais néanmoins m'y habituer, cela n'était que question de temps et l'optique d'être instituteur motivait les plus infimes allocutions candides que je déclinais. Ainsi, l'éphèbe qui me convoyait était un professeur de musique, je n'étais donc pas dans le tord, et cela me rassurait. Même si je ne m'identifiais aucunement aux lycéens ingénus, je ne pouvais m'empêcher d'aspirer à lier une probable camaraderie à l'encontre de mon confrère. J'avais évidemment besoin de camper mes marques en cet établissement, et ce locuteur me paraissait sympathique. Il se dévoilait amateur de musique, de surcroît.

- Je vous remercie pour cette proposition diligente, Wakaouji-sensei. Je n'aurai certainement pas besoin de prendre du repos. Il me tarde de débuter la classe et de rencontrer les élèves, avec qui j'espère évidemment m'entendre. De plus, j'ai pu dormir plusieurs heures lors du trajet me conduisant jusqu'ici. Même si dormir affalé dans un siège de train n'est pas une expérience des plus confortables. Susurrais-je, marquant mon sourire d'une hilarité charmante tout en me massant une épaule en signature de mes paroles. Si ça ne vous pose aucun problème, puisque je ne désire pas vous déranger, je serais ravi de vous avoir pour guide, toutefois. Si vous voulez bien m'excuser, je vais simplement chercher mes valises. Murmurais-je, allant récupérer les mallettes, promptement, pour ensuite retourner aux flancs de l'adonis, souriant d'une moue enjôleuse. Je me laisse entre vos mains! Merci encore.

Talonnant mon collègue, je kidnappais au passage de mes doigts déliés les prospectus et imprimés adjoints à l'intendance de l'institution et juchés au creux d'innombrables rayonnages, ulcérant les feuillets bigarrés de mes serres sémillantes. Mon regard constellé de coloris céladons, gouverné d'engouement puéril, reluquait incessamment ces bordereaux traditionnels tandis que mes pas sujets à la célérité me poussaient à coudoyer le proviseur de musique avec béatitude, à l'effigie d'un enfant face à ses plus beaux rêves. Certes, j'étais heureux de déambuler dans cet établissement, chaperonné par l'envie de démarrer enfin ce pourquoi j'étais en ces lieux. Un seul élément, occulté sous mes mimiques affriolantes, ne cessait de suinter au foyer de mes pensées : faire classe. Oh oui, ce ne sera pas facile, j'en convenais. Les élèves de cette académie étant pour la plupart japonais, je devais me préparer à revoir de très nombreuses bases et ceci, loin de me désarçonner, m'amusait davantage. «Les manuels japonais sont sûrement différents de ceux utilisés en France. J'irai me renseigner à la directrice ou au secrétariat, après m'être installé, et les étudierai brièvement. Ils ne doivent tout de même pas être aussi disparates…» Pensais-je, quitte à percuter mon confrère en ces élucubrations. D'un coup d'œil complice, je zieutais mon guide, percevant dans son attitude une pondéreuse incompréhension, et esquissais un second sourire enivrant, égayé. Etais-je trop protocolaire ? C'était une certitude. Je n'envisageais absolument pas le langage familier et désirais m'adresser à mes pairs avec la contenance d'un professeur de Lettres. Mais, rah, que c'était sentencieux…Et le besoin de vouloir bien faire m'y contraignait inconsciemment. Je me voyais mal taper l'épaule de cet homme, cavalier, et déclamer : « Zyva gros, bien ou quoi ? Wesch tranquille ? J'kiff grave c'te piaule gars, t'veux pas devenir mon cousin, keum ? Ou j'te n*que ta m…» Non, non, impossible.

Parvenant à mes appartements, je me distrayais des clameurs parvenant à mes oreilles, paquetages sous le bras.
Les étudiantes de Girl Academy semblaient amusantes.
- Décidément, les jeunes filles vous aiment, Sensei. Ce sont des réactions distrayantes, et relativement insolites. Diverti, je guignais les couloirs d'une frimousse équivoque puis considérais l'envergure de la chambrée en me faufilant à l'intérieur, l'arôme putride des parois closes me remontant au travers de la gorge. Réjoui – non pas par l'odeur de chaussette mais par le parfum d'une vie neuve, j'exposais mes affaires aux lisières de la porte et m'étirais, placide, estimant le gentilhomme ouvrant les fenêtres et m'ayant conduit au détour de ce labyrinthe de salles numérotées. A noter : investir dans une carte de l'académie, histoire de ne pas se perdre et clamser dans les escaliers dès le préambule de l'année.

- J'espere que te sentira a ton aise ici.

- Sans aucun doute. C'est parfait ! Le parfum d'ambiance est un peu à revoir, mais cette chambre est très bien. Et vous, Sensei, vous logez également dans ces dortoirs ? Formulais-je, m'approchant d'un lit pour en chasser la poussière. Merci encore. En espérant que notre collaboration sera fructueuse ! Ce n'est véritablement pas à moi de dire ça, mais si vous avez besoin d'aide un jour, n'hésitez pas. Je vous en dois une. Sans vous, à l'heure qu'il est, je serais probablement errant on-ne-sait-où. Ricanant, j'essayais de paraître plus simple, sans réelles conclusions. Au fait, savez-vous quand débutent officiellement les cours de Français ? Je rendrai visite à Madame la Directrice, ou au Secrétariat lorsque le moment sera venu.

Consciencieux, je bivouaquais malles et paquets à l'orée d'une penderie archaïque, rasant la boiserie d'une mimine méticuleuse, et consultais mon collaborateur d'une œillade déférente, escorté par le barouf du barda qu'un talon pudibond s'évertuait à rassembler aux pieds du meuble vétuste. Assidu, je décochais à mon alter égo un sourire adjoignant le mignon au distingué, agençant le col du cardigan puis ses binocles hyalines d'un pouce minutieux, convenant, et me lovais à l'apogée du mutisme, tergiversant quant aux potentialités de crayonner un dialogue antagonique aux précédents et évincer par conséquent le silence irascible. Guillotiné sous la tare de l'adolescence, je m'efforçais pour autant de contenir mes sollicitations, réservé, et me contentais d'acquiescer vis-à-vis du laïus, feutré.

-Effectivement je loge ici aussi ainsi que d autre professeur que vous surement l’occasion de croise au détour d’un couloir quand a vous cours il faudra effectivement demander a la directrice.

- Je vois. Nous sommes donc voisins de chambres ? C'est super. Déclarais-je, béat. M'inclinant avec aisance, je soumettais le matelas virginal d'un poignet alerte et m'asseyais sur ses draperies, dédaignant mes jambes ténues ornementées de nylon; mes prunelles d'ocre, aux pigments de jade, choyées d'une frange flavescente. Mes cuisses ankylosées par le transport, je zieutais mon associé aux épis topaze, serein, et manifestais une surprise prude alors qu'une damoiselle, incontestablement plus jeune que moi de quelques années, s'immisçait dans la garçonnière.

- Bonjour Melle Kazuya effectivement je crois votre nouveau professeur de français Mr Koga Kurenai et il semblais quelque peu perdu et don je me suis proposer de l accompagner jusqu’au dortoir et par la suite lui faire visiter les différents bâtiments. Tel était le prologue de mon auxiliaire. Mademoiselle Kazuya. Une lycéenne, indubitablement. Pantois, je me relevais, pondéré, et époussetais le pourtour de mes hardes d'un geste modique avant d'aborder la jouvencelle à qui j'aurai l'honneur d'enseigner ultérieurement, mes chausses d'auburn abusant le dallage au parquet séculaire de la piaule.

- Mademoiselle Kazuya, c'est un plaisir. Appelez-moi simplement Koga, la différence d'âges nous séparant n'est pas si imposante : je n'ai que vingt ans. Penchant faiblement et brièvement ma frimousse amène sur le côté, doux, je consacrais à cette interlocutrice d'un énième sourire courtois, ravi. J'espérais sympathiser avec mes élèves, et honorer mon rang de professeur. Monsieur Wakaouji m'a en effet été d'un grand secours, et je l'en remercie encore.

Coi et hiératique dans mon habit de jais, j'estimais posément mes condisciples éloquents en moult œillades flegmatiques, calligraphiant sur mon domino placide une mimique enthousiasmée; réservée de faconde. Tandis que mon interlocutrice aux boucles d'ambre s'épanchait en préface, je lynchais un rire malingre, amusé par ce préambule protocolaire. Nonobstant mon aphorisme, ces propos obséquieux me flanquaient pour autant d'un sobriquet révérencieux. L'abordage de la familiarité vertueuse me paraissait subitement plus délicat à conquérir. A défaut d'énucléer de ma déclaration cette énième requête de promiscuité, je m'éternisais derechef au nid d'un mutisme perplexe puis réitérais mes bienséances en une diligence ravissante, captivé vis-à-vis d'un tel grade.

- Ravi de vous connaître, pareillement, Mademoiselle Kazuya Fuyuka. Occuper une place comme la vôtre ne doit assurément pas être amusant tous les jours, je suis impressionné. Confessais-je, zélé.

Bivouaquant mes iris ceinturés de verdelet aux bordures du proviseur de musique, j'ouï aux veines du silence l'allocution antagoniste et occultais une hilarité candide sous des phalanges dogmatiques, amical. J'avais jadis eu l'opportunité de mirer la passion des jouvencelles à l'encontre de leur aîné, et cette nouvelle révélation me scellait en ces pensées. Cette attitude me semblait commune aux établissements réservés à la gente féminine, et l'engouement des élèves aurait naturellement été identique au foyer d'un pensionnat pour damoiseaux gouverné par des professeurs ornées de décolletés.

"Bonjour Wakaouji-sensei, Kazuya-chan"

Orientant mes prunelles en direction du préambule, j'avisais une ravissante jeune femme au feston d'étudiante et en sauvegardais ma sollicitude, la saluant avant tout d'un mouvement de buste usuel; plaisant, à l'effigie des coutumes japonaises, saluer à la manière de France n'étant guère répandu en ces terroirs nippons. Intrigué, je détournais les yeux en la voyant chuchoter et apposais mes pupilles mordorées aux conifères extérieurs, contemplant par la fenêtre les jardins de l'académie, aphone; feutré jusqu'à ce que mon inattention ne soit foudroyée par un second prélude.

- Je tien a vous présenter votre nouveau professeur de français Mr Koga Kurenai.

"Enchanter de faire votre connaissance Kurenai-sensei, je suis Otomiya Haine, j'ai 16 et je suis en classe de première." A ces deux avant-propos succincts, j'arrimais mon regard en amont de ladite damoiselle et toussotais, endimanchant mes phrases d'une aménité exquise, authentique. En sa courbette, je distinguais une noble signature et tergiversais.

- Kurenai Koga, vingt ans. Oubliez le "sensei" entre nous et nommez-moi seulement Koga. Même si cette épithète est une marque de respect, elle m'offre la désagréable impression d'être beaucoup plus vieux que je ne le suis. Dévoilais-je, diverti, penaud. Galant, je décidais de répondre à son inclination par une révérence déférente et lui adressais un sourire gentillet, agréable, griffonnant mon geste d'une nuance taquine vouée à l'estime. Tout le plaisir est pour moi, Mademoiselle Otomiya. J'espère avoir la prompte occasion de vous voir participer aux cours de Français.